Selon l’INSEE, les Français n’auront jamais autant créé d’entreprises qu’en 2020. On y a en effet dénombré pas moins de 848 200 créations d’entreprises, tous statuts confondus. De toute évidence, les sirènes de l’indépendance attirent de plus en plus de monde… Pour autant, il n’est pas toujours facile de choisir le statut le plus adapté à son activité. D’autant que créer une société demande du temps (et de l’argent) : rédaction des statuts, immatriculation de la société, ouverture d’un compte bancaire professionnel…
Le portage salarial et l’auto entreprise, avec leurs formalités simplifiées, s’imposent donc comme des solutions idéales pour ceux qui souhaitent lancer leur entreprise. Mais quelles sont les différences entre ces deux statuts, et quels critères convient-il de prendre en compte pour faire son choix ?
L’auto-entreprise : de quoi s’agit-il ?
Depuis 2016, le régime de l’auto-entreprise a été officiellement renommé "régime de la micro-entreprise". Cette nouvelle dénomination ne change rien au fonctionnement ni aux particularités de ce régime, qui continue d’être désigné à grande échelle sous son ancien nom. Pour ces raisons, nous emploierons dans cet article le terme plus usité d’auto-entreprise.
Ce régime juridique a été créé en 2008, pour faciliter la création d’entreprise et les formalités administratives qui y sont rattachées. Plus de deux millions d’auto-entreprises existent aujourd’hui en France.
L’auto-entreprise se distingue par le fait qu’elle n’est pas une société et ne possède
donc pas de personnalité juridique distincte de celle de l’entrepreneur. Patrimoine personnel et patrimoine professionel sont ainsi confondus.
Elle se distingue également par son régime simplifié : à la différence des sociétés unipersonnelles (EURL ou SASU), il n’est pas nécessaire de rédiger des statuts, ni d’immatriculer son entreprise. Une fois que l’auto-entreprise a été créée (quelques clics suffisent), seule une comptabilité simplifiée est requise. Il convient notamment de déclarer son chiffre d’affaires auprès de l’URSSAF, soit mensuellement soit trimestriellement selon l’option choisie.
Les charges sociales de l’auto-entrepreneur sont déterminées par son chiffre d’affaires. Les taux de cotisations sociales dépendent de l’activité exercée : ils varient entre 12,8 % et 22 % du chiffre d’affaires.
Attention : il existe des plafonds de chiffre d’affaires à ne pas dépasser pour bénéficier du statut d’auto-entrepreneur. Ces plafonds sont les suivants :
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176 200 euros pour les activités de vente de biens et prestations d’hébergement ;
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72 500 euros pour les prestations de services et les activités libérales.
Par ailleurs, en dessous d’un certain seuil, l’auto-entrepreneur bénéficie d’une franchise de TVA. Cela signifie qu’il ne la collecte pas et qu’il ne la reverse pas à l’Etat.
Le régime de l’auto-entreprise se caractérise également par l’impossibilité de déduire ses frais professionnels. Cette limite peut être un véritable frein si l’activité professionnelle de l’entrepreneur nécessite des dépenses importantes (matériel, logiciels, frais de déplacement, etc). Vous pouvez néanmoins récupérer la TVA de vos frais professionnels si vous y êtes soumis.
Enfin, en cas de non-réussite du projet, la clôture d’une auto-entreprise est très simple, ce qui n’est pas le cas pour une société unipersonnelle. Il est également possible de basculer sur un autre statut dans le cas où l’activité de l’auto-entrepreneur se développerait.
Le portage salarial : de quoi s’agit-il ?
Le portage salarial est une relation contractuelle tripartite dans laquelle un entrepreneur (le salarié porté) fait appel à une société de portage salarial pour faire le lien entre son entreprise cliente et lui-même. Un contrat commercial est ainsi établi entre la société de portage salarial et l’entreprise cliente. Quant à l’entrepreneur, il bénéficie d’un contrat de travail en CDD ou en CDI, tout en exerçant ses missions de manière autonome. Tous les mois, il reçoit un salaire calculé en fonction de son chiffre d’affaires.
Cette nouvelle forme d’emploi, née dans les années 1980, connaît aujourd’hui une croissance importante, avec environ 90 000 salariés portés en France.
Il faut dire que le portage salarial offre de nombreux avantages :
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Une absence de formalités : contrairement à ce que l’on croit parfois, il n’est pas nécessaire de créer une société pour être salarié porté. Il suffit en réalité de rejoindre une entreprise de portage salarial.
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Un contrat de travail officiel : le salarié porté bénéficie d’un contrat de travail en CDD ou en CDI, et de bulletins de salaire.
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Une protection sociale renforcée : par rapport à un travailleur indépendant classique, le salarié porté bénéficie d’une protection sociale complète, identique à celle des salariés (chômage, assurance maladie, retraite).
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Une gestion administrative simplifiée : il n’est pas nécessaire de tenir une comptabilité ou de déclarer ses revenus, car c’est la société de portage qui gère les formalités du quotidien.
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La possibilité de déduire ses frais professionnels, contrairement au régime de l’auto-entreprise.
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Une absence de plafonnement du chiffre d’affaires, ce qui laisse le salarié porté plus libre dans la réalisation de ses projets.
Mais attention, le portage salarial n’est pas ouvert à tous les métiers. La convention collective du portage salarial interdit en effet le statut à certaines professions, comme les métiers du service à la personne, les professions réglementées et les métiers de la vente. Un certain niveau d’études est également requis : le portage salarial est ainsi ouvert aux experts autonomes disposant d’un bac+2 ou ayant 3 ans d’expérience, et dont la rémunération minimale est de 2000 euros net mensuel.
Enfin, il est important de souligner que les frais de gestion et les charges sociales sont relativement lourds en portage salarial. Le salaire net d’un salarié porté correspond en général à 45 % de son chiffre d’affaires hors taxe.
Peut-on cumuler statut d’auto-entrepreneur et portage salarial ?
Cette solution est notamment conseillée aux travailleurs indépendants qui hésitent entre l’auto-entreprise et le portage salarial, et qui souhaitent profiter des avantages de chaque statut. Ils peuvent ainsi facturer certaines missions via leur statut d’auto-entrepreneur, et facturer d’autres missions au travers de leur société de portage.
Par exemple, l’auto-entrepreneur qui atteint le plafond du chiffre d’affaires autorisé sur l’année peut continuer son activité en portage salarial. Il peut également décider de facturer via sa société de portage car la mission qu’il s’apprête à réaliser nécessite de nombreux frais (déplacement, logement, etc) : non-déductibles sous le statut auto-entrepreneur, les frais professionnels peuvent en revanche être remboursés au salarié porté.
Comment faire son choix entre portage salarial et auto-entreprise ?
On l’a vu, portage salarial et auto-entreprise bénéficient de nombreux avantages respectifs. Reste alors à choisir entre ces deux statuts, en fonction notamment de son activité, de ses ambitions… Si aucun statut n’est meilleur que l’autre dans l’absolu, l’auto-entreprise ou le portage salarial ne sont pas adaptés à toutes les activités.
A ce titre, voici quelques questions à se poser avant de faire son choix :
De quel niveau de protection souhaitez-vous bénéficier ?
Si l’auto-entreprise est très flexible, elle est également plus risquée en raison de la protection sociale limitée qu’elle propose.
Le portage salarial, quant à lui, permet aux entrepreneurs de bénéficier d’une protection sociale complète, identique à celle des salariés classiques.
Quel type d’activité souhaitez-vous développer ?
L’auto-entreprise étant soumise à des plafonds de chiffre d’affaires (qui nécessitent en cas de dépassement le basculement en société, plus contraignant), il n’est pas possible d’exercer n’importe quelle activité avec ce statut. Si vous souhaitez développer rapidement votre entreprise ou que vous envisagez de réaliser un chiffre d’affaires important, mieux vaut opter pour le portage salarial, qui n’est soumis à aucun plafond.
Si en revanche vous souhaitez tester une activité commerciale ou artisanale, ou proposer des prestations à un coût restreint, le statut d’auto-entrepreneur s’avère plus approprié, et ce d’autant plus que les cotisations sociales sont moindres.
Avez-vous de nombreux frais ?
Avec le portage salarial, le salarié porté a la possibilité de déduire ses frais professionnels (frais de mission et frais de fonctionnement). Cela signifie qu’ils ne rentrent pas dans le calcul de ses impôts, ce qui est particulièrement intéressant si son activité nécessite de nombreux frais de prospection, d’investissement, de déplacement, etc.
L’auto-entrepreneur, en revanche, ne peut pas déduire ses frais professionnels.
Souhaitez-vous être maître de votre propre structure ?
Le statut auto-entrepreneur s’adresse plutôt aux indépendants qui souhaitent maîtriser la création (et le bon déroulé) de leur propre structure. L’auto-entreprise se confondant avec la personne de l’entrepreneur, il est plus facile d’incarner son activité et d’agir en chef d’entreprise avec ce statut.
Le salarié porté, s’il exerce ses missions en toute autonomie (il doit ainsi chercher ses propres clients et définir lui-même les modalités de son activité), est encadré par une société de portage. Celle-ci le représente et gère les formalités administratives relatives à son activité. Sa marge de manœuvre est donc un peu plus limitée.
Avez-vous un projet immobilier ?
Il n’est pas toujours facile de contracter des emprunts quand on exerce en tant qu’indépendant. Pour se protéger, les banques exigent généralement trois bilans positifs qui prouvent la bonne santé de l’entreprise : difficile, donc, d’emprunter juste après avoir lancé son activité. C’est la raison pour laquelle il vaut mieux opter pour le portage salarial en cas de projet immobilier, le salarié porté bénéficiant d’un contrat de travail et de bulletins de salaire.